Et pour cause, le nigiri sushi affiche une simplicité étonnante : il se compose le plus souvent d’un morceau de poisson en tranches (« neta ») posé délicatement sur un cylindre de riz assaisonné de vinaigre (« shari »), et d’un peu de wasabi. C’est cette forme de sushi qui a développé une complexité et une richesse qui ne peuvent être atteintes que par une grande connaissance technique et une culture du poisson acquises au bout de très nombreuses années par les maîtres sushis. Car si à la base, un nigiri sushi est juste du poisson sur du riz, son art est devenu une discipline hautement technique où les saveurs, les textures et les parfums ne peuvent être que créées qu’avec deux éléments : du riz et du poisson.
Le riz, la base du nigiri sushi
Comme le veut la tradition de l’école Edomae, le riz à sushi n’est assaisonné que de vinaigre de riz et de sel, le type de vinaigre étant choisi en fonction du type de poisson. Une règle classique veut que les vinaigres les plus forts soient utilisés pour les sushis à chair rouge comme le thon ou la bonite, tandis que les vinaigres plus léger seront plutôt utilisés sur les poissons à chair blanche comme la sériole couronnée. Dans la réalité, le chef peut bien entendu réaliser la recette la plus adapté au poisson, y compris s’éloigner de la tradition et réaliser ses propres mélanges (certains ajoutent par exemple une petite quantité de sucre pour donner au riz de la douceur).
Dans tous les cas, la cuisson du riz aura une importance capitale sur le goût du sushi et sa texture. Si la cuisson du riz doit faciliter la mastication, le riz ne doit pas pour autant être trop cuit, car s’il est trop pâteux, il va gâcher tout le plaisir de la dégustation. Il est de tradition de dire que chaque grain de riz doit pouvoir être apprécié lors de la dégustation. Il ne faut pas pour autant qu’il ne soit pas assez cuit sous peine de voir le sushi trop dur et un contraste trop grand entre la chair douce du poisson et les grains de riz.
Autre élément important, il doit suffisamment coller pour ne pas se détacher lorsque le maître sushi vous pose le sushi devant vous, le riz doit être façonné doucement de sorte que les grains tiennent ensemble mais sans être trop serrés sous peine de vous demander de trop mâcher et de faire disparaître à l’arrière plan le gout du poisson. Un riz qui est en vrac et doux se mélangera à la texture du poisson afin que tout soit parfaitement homogène.
En fonction du riz, le chef de sushi doit laver son riz de très nombreuses fois. Si pour du riz de table, il est conseillé de le laver deux ou trois fois à grandes eaux, pour le riz à sushi, cela peut dépasser la dizaine de fois pour bien supprimer le morceau de la poudre et de l’amidon qui empêcheraient le riz de coller à lui-même.
Le neta, la garniture reine
Le neta (la garniture qui peut être un poisson, un coquillage, etc) ne doit pas être trop mince pour être imperceptible au sommet du riz. Il ne doit pas non plus être trop épais. Le sushi créé par le chef doit correspondre à une bouchée parfaite et donc être mangé en un seule fois.
La tranche de poisson ne doit pas être simplement placée sur le dessus du riz ;elle doit être pressée doucement pour former une unité délicieuse. Un bon chef devrait utiliser ses mains pour façonner le poisson sur le riz, produisant un nigiri sushi incurvé et lisse. La chair est souvent rayée sur le dessous en utilisant le couteau pour faire de nombreuses petites coupes parallèles et hachurées, ce qui rend les sushis beaucoup plus doux et plus faciles à mâcher. Pour les neta très moelleux comme le calmar (ika), il est essentiel. Pour les poissons plus mous, plus il y a de coupes, plus les sushis fondent dans la bouche avec un minimum de mastication.
Bien sûr, le goût du poisson compte aussi. Certains sushis devraient avoir un goût très frais et propre tandis que d’autres devraient avoir une saveur umami très profonde et riche qui provient du vieillissement. De manière générale, les gros poissons comme le thon (maguro) et le cardeau hiramé (hirame) sont vieillis, les petits poissons comme la dorade (tai) sont frais et les crustacés comme les coquilles saint-jacques (hotate) sont toujours servis aussi frais que possible. De nombreux poissons sont séchés dans un mélange de sel et de sucre pour chasser l’humidité et concentrer la saveur.
Chaque sushi est généralement servi avec les accompagnements classiques d’un menu omakase : wasabi, gingembre, sauce soja, et thé